Communiqué du Collectif
Féminicides Par Compagnons ou Ex
25 novembre 2024,
Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes
Communiqué du Collectif
Féminicides Par Compagnons ou Ex
Notre communiqué ne change pas plus que ne s’améliore la condition des femmes dans notre pays.
Encore à ce jour, au moins 88 femmes ont été tuées par un compagnon ou un ex depuis le 1er janvier 2024, sans compter les féminicides qui subissent l’omerta des Parquets. Alors que le Ministre de la Justice s’est félicité d’une “baisse” en 2023, nous dénombrons tous les jours des femmes grièvement blessées par leur compagnon ou ex et tous les 3 jours, l’un d’eux donne la mort à celle qui a partagé sa vie, à la mère de ses enfants, parfois en leur présence.
Après bientôt 9 ans de recensement des féminicides conjugaux publiés dans les médias, et 6 ans après le Grenelle, nous constatons que, malgré les annonces et les mesures prises par ce gouvernement, ces crimes systémiques s’enchaînent toujours d’une manière effrénée.
Il y a toujours, dans le discours des différents ministères qui se succèdent, l’idée de “mise en sécurité” des femmes, comme si les violences masculines étaient un phénomène naturel.
Aucune mesure n’est prise pour empêcher ces hommes violents de nuire, au contraire, les BAR, les TDG leur permettent de rester en liberté voire de continuer à terroriser leurs victimes.
Malgré les formations, les circulaires, les recommandations proposées par ce gouvernement, nous constatons encore que dans les commissariats, les tribunaux, la parole des femmes n’est pas correctement prise en compte, le danger qu'elles encourent est mal évalué.
A ce jour, au moins 26 % des meurtriers avaient déjà été condamnés pour violences conjugales, certains avaient même déjà tué une compagne et avaient été libérés bien avant la fin de leur peine.
Les victimes avaient déposé des plaintes qui n’ont pas été transmises au parquet.
Ces féminicides auraient aussi pu être évités.
La Police, la Justice savaient, avaient tous les éléments pour s’alerter et interpeller ces hommes avant qu’ils ne passent à l’acte.
Aujourd’hui, il y a toujours des mains courantes proposées aux femmes victimes de violences par les forces de l’ordre malgré la circulaire de 2021 interdisant ce procédé. Elles subissent toujours des préjugés négatifs et sexistes : elles sont soupçonnées de mentir, exagérer, ou vouloir priver le père de ses enfants.
Des suspicions misogynes s’enchaînent à tous les étages de l’institution judiciaire et des services de l’État censés protéger les femmes. Et lorsque les plaintes sont prises, environ 80 % d’entre elles sont encore classées. Lorsqu’elles sont instruites, les faits sont presque systématiquement requalifiés : une « tentative de meurtre » devient alors « violence habituelle sur conjoint » (autant dire que c’est « normal » ? ) et jugés par un Tribunal Correctionnel. Des condamnations dérisoires en découlent, stages, bracelets, sursis, interdiction d’approcher… Sans oublier ces femmes qui n'iront pas porter plainte, car quasiment certaines que rien ne sera fait pour les protéger, et que leur situation de danger pourrait empirer.
Jugées “fragiles”, “dépressives” ou encore “malades” par les forces de l'ordre, nombre de femmes “disparues” ou “décédées dans des circonstances troubles” n'ont pas fait l'objet d'enquête sérieuse dès leur disparition ou leur décès. C'est pourquoi des années après avoir mis ces enquêtes sous surveillance, nous finissons par recenser certaines de ces femmes comme victimes de féminicides par compagnons ou ex lorsque ces hommes sont ENFIN mis en examen ou condamnés après des années d'impunité. Ces suspicions misogynes sont un frein dans les enquêtes et une violence supplémentaire infligée aux victimes et leurs proches.
Une impunité généralisée, grâce à laquelle les agresseurs recommencent trop souvent, et sont rarement privés de liberté même en cas de récidive de violences.
Les peines légères sont insuffisamment dissuasives, les agresseurs en sont conscients et se croient libres de continuer à harceler, menacer, agresser leurs ex-compagnes, leurs enfants. Ils conservent systématiquement l’autorité parentale qu'ils utilisent pour exercer un contrôle sur la mère, et la loi Santiago annonce peu de changement, elle ne sera pas suspendue le temps de l’enquête mais uniquement en cas de poursuite pénale et si la victime est gravement blessée (8j d’ITT).
Quant à ceux qui sont condamnés devant une Cour d’Assises, nous observons également des peines souvent insuffisantes, pas toujours accompagnées de peine de sûreté ou de retrait de l’autorité parentale ! Ce qui favorise là aussi la récidive, certains auteurs de féminicide ont déjà tué ou tenté de tuer plusieurs compagnes malgré une première condamnation aux Assises.
Quels adultes vont devenir les enfants qui ont côtoyé cette terreur, ces violences banalisées, réitérées, presque autorisées ?
Si leur père a conservé le droit de les éduquer dans ces principes, ce seront les hommes violents et les femmes victimes de demain !
Il faut en finir avec l’impunité des hommes violents.
Ce sont eux qui doivent être arrêtés, exclus du domicile, réinsérés, rééduqués à leurs frais, et dissuadés de récidiver par des sanctions exemplaires.
Pourquoi ce gouvernement ne se donne-t-il pas des moyens efficaces pour réduire ce phénomène systémique ?
Pourquoi persister à refuser d'admettre que le machisme et la misogynie règnent encore dans notre société et mettent en danger la vie des femmes et de leurs enfants?
Les dépenses liées aux violences machistes sont pourtant astronomiques (plusieurs milliards d'euros chaque année en coûts directs et indirects) et impactent lourdement les budgets de l’Etat, dans l’indifférence générale.
Notre société est-elle prête à payer si cher pour préserver cette domination masculine mortifère ?
Pourquoi ce refus de pacifier la société et d’en finir avec ce sacrifice des femmes ? Pour préserver la liberté des hommes ?
Pourquoi peut-on encore lire dans certains médias «drame conjugal », « drame familial » ou « drame de la vieillesse » dans des articles qui couvrent des assassins de circonstances atténuantes, font leur éloge ou n’hésitent pas à blâmer la victime ?
Même dans la mort, ces femmes ne sont pas respectées. Dans beaucoup trop d’affaires, elles ont été battues, asphyxiées, violées à mort par leur conjoint ou ex et la justice a minimisé les faits en condamnant ces tueurs pour “violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner” !
Pourquoi ce déni des violences machistes ?
Ces violences sont majoritairement perpétrées par des hommes.
Prétendre qu’une symétrie existerait dans les violences conjugales ne sert qu'à nier le problème.
Tous les chiffres démontrent que les victimes sont essentiellement des femmes ainsi que leurs enfants !
Il est urgent de mettre un terme à cette terreur mortifère que les hommes exercent sur les femmes et qui participe à l’archaïsme de notre société.
Notre civilisation doit évoluer, nous devons donner au monde l'exemple d'une société possiblement juste pour les femmes.
"Le féminisme n'a jamais tué personne.
Le machisme tue tous les jours"
Benoîte Groult